mardi 31 mars 2015

Captives - Atom Egoyan

Comment ne pas comparer Captives à Prisoners sorti en 2013 (avec notamment Hugh Jackman et Jake Gyllenhal à l'affiche, sans oublier...Paul Dano....*cri de fan hystérique, ahem*), et dont le point commun réside dans le sujet qui est traité, à savoir le rapt d'enfants ?

Le premier n'est-il qu'une pâle copie du second, ou réussit-il à être...*roulement de tambours*...Captivant ? (avouez, vous ne l'aviez pas vu venir !)


Affiche du film Captives
Indépendamment de ce que j'ai pu penser du film, je tenais à souligner la beauté de l'affiche, et surtout sa pertinence par rapport au scénario et au personnage de Matthew


Regarder Captives après Prisoners (et vice et versa, mais voilà que je m'égare), ce n'est pas facile car nous sommes tentés de jouer au jeu des 7 erreurs et de faire le parallèle entre chacun des films. 

Huit clos à ciel ouvert ?

A l'instar de Prisoners, Captives porte un nom qui revêt de multiples sens au regard du développement de l'intrigue, et plus précisément au regard de l'évolution des personnages. Finalement, qui de l'absent retenu contre son gré (ici, l'enfant) ou de celui "qui reste" (les parents), est le plus captif ? Dans Captives, le titre est d'autant plus percutant qu'au fur et à mesure de l'intrigue, on voit se développer d'autres personnages que ceux principaux dont on peut se poser aussi, la question du libre arbitre ou de la disposition de soi (finalement, sont-ils aussi captifs que les autres ?).

Le choix d'Atom Egoyan de porter le film en plein coeur de l'hiver, dans de vastes espaces enneigés, ne fait que renforcer le sentiment d'isolement des personnages, mais surtout, de l'instant figé, comme en  témoignent en arrière-plan les chutes du Niagara, gelées dans leur mouvement et dont l'immobilité a quelque chose d'irréaliste. Captives montre véritablement un temps suspendu dont l'intérêt, pour le spectateur est de savoir non pas si, mais quand les choses bougeront (et de quelle façon).


Un père engagé, une mère...Démissionnaire ?

Autre point commun, le rôle de la femme au sein du couple affecté par la disparition de l'enfant. Dans Prisoners, on observe un père engagé, prêt à tout (et notamment à la violence) pour retrouver sa fille. Ryan Reynolds campe un personnage plus en retrait, mais que l'on sent d'autant plus déterminé qu'il ne s'agit rien de moins que de tenter d'évacuer la culpabilité qui le ronge.

La mère (incarnée par Mireille Enos), elle, craque (c'est une femme, que voulez-vous, nous sommes nées pour ça). Son personnage est perçu assez audacieusement dans le film surtout à travers le prisme de la caméra qui la filme dans son chagrin, nous positionnant, le ravisseur et nous, dans une situation de voyeurisme par rapport à sa tristesse; tristesse augmentée par un jeu cruel que met en place le ravisseur. 

Le film réussit à montrer de façon ponctuelle, toujours avec subtilité et pudeur les conséquences sur le couple parental de la disparition de l'enfant : les reproches de la mère, la fuite du père, finalement la vacuité du couple et son impossibilité à aller de l'avant, et encore moins à deux.

Et sur le reste ?

Une différence majeure entre Captives et Prisoners repose sur l'angle sous lequel est abordé le sujet du rapt. Dans Prisoners, le spectateur, jusqu'au bout, ignore ce qu'il advient des fillettes. On ne sait ni si elles sont en vie, ni qui les retient le cas échéant. La scène d'ouverture de Captives quant à elle nous montre une jeune femme, dont on devine de suite qu'elle est la fillette kidnappée...Il y a cela bien des années. Nous suivons ainsi son parcours, et tout en retenue, nous devinons les multiples visages que peut prendre la pédophilie et la cybercriminalité à cet égard. Ce n'est jamais raccoleur, mais ça fait froid dans le dos quand même, parce que ça parait tellement fou que ça ne saurait être...que trop vrai ? 
Ainsi, c'est cela qui est intéressant dans Captives également : ce traitement qui est fait d'un sujet grave qu'est celui du kidnapping d'enfants, et tout ce que cela peut impliquer (et je ne parle pas de les brûler comme au Brésil, chanson à prendre au millième degrés, hein).

Là où Captive fait fort, mais peut-être un peu trop, c'est dans le brouillage de piste opéré par le réalisateur sur le plan temporel : nous évoluons entre flashbacks de différentes époques (le jour J, six ans après,...) et l'instant T où se déroule l'intrigue. Je dis un peu trop, car, habitués que nous sommes à contempler des flashbacks baignant dans un filtre photo façon "soleil de fin d'été, quand tout allait bien" avec des personnages dont le look diffère souvent de l'instant T de façon à ce que nous identifions BIEN les repères temporels, dans Captives les flashbacks et le présent se mêlent dans une même trame photographique (même paysage enneigé, même look des personnages). 

Par voie de conséquence, tout comme les personnages, le spectateur peut avoir le sentiment que le temps est figé. Mais à l'inverse des personnages qui connaissent le scénario (n'est-ce pas, ils sont forts, quand même), le spectateur lui, peut se retrouver égaré lorsqu'on lui montre telle scène suite à une autre et que le lien n'est pas évident à établir ("attends, on est QUAND, là ?"). 
Perturbant. Même si je vois l'idée, et qu'elle n'est pas mauvaise, je n'ai pas trop apprécié. 


Ah ! Et où avais-je la tête (peut-être à Interstellar...? Le teaser de ouf guedin) : un peu plus et j'oubliais de vous parler de la très bonne prestation que nous livre Ryan Reynolds dans le film. Ce dernier partant de loin (à peu près d'aussi loin dans mon estime que Ben Affleck qui s'est révélé brillant dans Gone Girl, normal, il incarnait un mec à l'air amorphe et paumé), il m'a agréablement surprise en père soucieux, voûté sous le poids de sa culpabilité (et de sa grande taille), et qui cherche inlassablement sa fille, sous la neige, sur les routes (toute la Sainte Journée, décidément, ce billet est de plus en plus musical).




Au rayon personnages toujours, je sors un carton rouge pour Rosario Dawson (qui incarne la Comissaire en charge de l'enquête) et son bras droit (personnage physiquement intelligent, mais ça s'arrête là), beaucoup moins pertinents dans leur approche que Jake Gyllenhal dans Prisoners (mais bon, j'avoue avoir des affinités cinématographiques avec cet acteur, nul doute que je ne suis pas objective). 
Kevin Durand qui incarne un ravisseur tellement lisse qu'il en devient franchement inquiétant, joue également très bien, de même qu'Alexia Fast, que je ne connaissais pas, mais que j'ai trouvé très convaincante dans son rôle (elle inspire vraiment l'empathie). 

Finalement, Prisoners ou Captives ? 

Bien que les deux films soient bons, j'ai malgré tout eu une préférence pour Prisoners, en raison de la tension beaucoup plus palpable qui jalonnait l'ensemble du film et l'ambivalence des personnages (notamment le couple d'amis de la famille, dont la fille a également été kidnappée). 
Captives, lui, filmant peut-être plus "l'intime" et s'égarant en chemin par rapport à certains personnages (le duo de policiers, par exemple), loupe le coche de peu en étant moins puissant que son confrère et un peu expéditif sur la fin (pourtant très tendue). Mais bon, c'est vraiment pour chipoter.




Alors, Captives ?








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